Le CNC a dévoilé son bilan annuel des investissements dans le cinéma français pour l’année 2024. Si CANAL+ conserve son rôle historique de premier financeur, la progression des plateformes de streaming continue de s’accélérer. Netflix s’impose désormais comme la plateforme la plus engagée dans la production de films français, avec un nombre record de projets soutenus. La question du financement de Netflix pour le cinéma français devient donc déterminante.
Une montée en puissance continue des plateformes
En 2024, 45 films d’initiative française ont été financés par des plateformes de vidéo à la demande par abonnement (SVOD). Un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes : 39 films en 2023, 17 en 2022, et un seul en 2021. Cette croissance témoigne de la consolidation du modèle SVOD dans l’écosystème de production hexagonal.
Netflix se distingue nettement avec 27 films financés, contre 10 pour Disney+, 6 pour Prime Video et 2 pour Max (Warner Bros. Discovery). Au total, les plateformes ont injecté 76 millions d’euros dans la production, avec un apport moyen par film de 1,7 million d’euros, en hausse de 37,9 % sur un an.
La majorité des projets soutenus par les plateformes concernent des films à budget élevé, avec un devis moyen de 9,52 millions d’euros. Seuls 14 films ont été produits avec un budget compris entre 1 et 4 millions, confirmant une tendance à privilégier les blockbusters nationaux.
Chronologie des médias : un levier d’investissement qui bouge
La révision de la chronologie des médias agit comme un puissant levier d’ajustement pour les plateformes. Disney+ a récemment réduit sa fenêtre de diffusion post-salle à 9 mois, contre 17 auparavant, en contrepartie d’un engagement financier plus conséquent. Cette logique pourrait influencer Netflix et Prime Video à terme, même si ces dernières maintiennent une position plus attentiste dans le cadre du financement du cinéma français.
La structure d’investissement des plateformes pourrait donc continuer d’évoluer en fonction des négociations futures autour des délais de diffusion et des quotas européens.
Les chaînes historiques conservent un rôle structurant, mais en recul
Malgré cette montée des plateformes, les groupes audiovisuels traditionnels restent les piliers du financement du cinéma français. En tête, CANAL+ représente encore 34,8 % des apports, avec 143 millions d’euros investis via la chaîne cryptée et 179 millions au total pour le groupe. Toutefois, sa part diminue régulièrement : -5,3 % par rapport à 2023 et -5,7 points par rapport à la période 2017-2019.
Le groupe France Télévisions affiche une légère progression avec 60 millions d’euros investis (+4,6 %), même si France 2 atteint son plus bas niveau depuis 10 ans, avec seulement 8,1 % des apports à hauteur de 33 millions d’euros.
TF1 maintient un niveau stable à 49 millions d’euros, tandis que M6 double sa contribution, atteignant 33,5 millions d’euros investis (+120 %), un signal fort d’un repositionnement stratégique dans la production.
Un nouvel équilibre de financement sous le coude ?
L’année 2024 marque un tournant structurel dans le financement du cinéma français. Tandis que les plateformes prennent une place croissante, les chaînes historiques adaptent leur stratégie face à un paysage concurrentiel mouvant. La place de Netflix, désormais en tête côté SVOD, témoigne d’une volonté affirmée d’ancrage dans la création française, au croisement des enjeux culturels, réglementaires et économiques.