Un retour prudent mais déterminant sur le marché européen
Après une suspension en juin 2024, Meta relance son programme d’entraînement d’IA en Europe. Cette décision de Meta IA concernant les données en Europe, publiée ce lundi 15 avril, marque une inflexion notable dans la stratégie du géant américain, qui s’était montré discret sur le Vieux Continent depuis la montée en puissance du RGPD et la pression réglementaire.
Le changement d’approche est clair : Meta prévoit désormais de s’appuyer sur les contenus publics postés sur Facebook, Instagram et WhatsApp pour entraîner ses modèles d’intelligence artificielle en utilisant les données en Europe. Une relance qui intervient alors que Meta AI, son assistant conversationnel, s’apprête à débarquer dans les pays européens.
Une initiative suspendue en 2024 sous la pression du RGPD
Cette volonté d’utiliser les contenus utilisateurs n’est pas nouvelle. Elle avait été formulée une première fois en 2024, avant d’être gelée sous la pression de la Data Protection Commission (DPC), le régulateur irlandais compétent pour les activités européennes de Meta. En cause : l’absence de garanties suffisantes sur la transparence, la finalité du traitement et la protection des mineurs.
Mais Meta semble avoir affûté ses arguments. Cette fois, l’entreprise précise que seuls les contenus « publics » seront utilisés, à l’exclusion des messages privés ou des stories restreintes. Les utilisateurs mineurs ne seront pas concernés, et un formulaire d’opposition est mis à disposition, en conformité avec le RGPD pour l’utilisation des données en Europe.
Un timing implacable pour s’imposer face à OpenAI, Google et Anthropic
Meta n’avance pas sans ambition. En mars dernier, Meta AI annonçait son lancement progressif en Europe, avec un premier déploiement au Royaume-Uni. L’objectif : concurrencer frontalement OpenAI (ChatGPT), Google (Gemini) et Anthropic (Claude) sur le terrain des IA génératives.
Mais pour proposer une IA pertinente et contextuelle en Europe, il fallait des données européennes. D’où l’intérêt d’utiliser les interactions publiques massives générées sur ses propres plateformes. Facebook, Instagram et WhatsApp représentent un volume considérable de texte, de commentaires, de descriptions et de publications localisées nécessaires pour Meta IA en Europe.
Meta tente donc de capitaliser sur sa base d’utilisateurs pour rattraper son retard algorithmique, tout en respectant, officiellement, les garde-fous du RGPD.
Une mise en œuvre dès cette semaine
La phase d’entraînement de l’IA commence dès cette semaine. Les utilisateurs de Facebook, Instagram et WhatsApp devraient recevoir une notification les informant de l’utilisation potentielle de leurs données publiques par Meta IA en Europe.
Ce procédé se veut plus transparent que lors de la première tentative. Mais il repose sur le principe du consentement implicite, assorti d’une option de retrait. Reste à voir si la DPC, ou d’autres CNIL européennes, jugeront cette approche suffisante pour garantir une conformité complète au RGPD.
Meta face au dilemme européen
Avec ce retour, Meta joue une carte risquée mais nécessaire. Face à la concurrence croissante des géants américains de l’IA, le groupe de Mark Zuckerberg ne peut rester à l’écart du marché européen, qui représente un levier stratégique à l’échelle mondiale.
Mais le cadre réglementaire strict de l’Union européenne, combiné à une défiance persistante envers les pratiques de Meta, impose une vigilance de tous les instants. L’entraînement de Meta AI sur les données publiques pourrait bien relancer le débat, (qui se complique pour Meta IA au niveau de l’utilisation des données en Europe), à l’heure où le règlement européen sur l’IA entre lui aussi en application.
La partie est donc loin d’être gagnée pour Meta. Mais une chose est sûre : la bataille de l’IA générative ne se jouera pas uniquement sur la technologie, mais aussi sur la capacité à inspirer confiance.