La neutralité du net est une problématique bien connue de nos lecteurs. Nous vous en parlions lors des RMLL 09 mais également plus récemment suite à une dérive de SFR. Les internautes les plus avertis sont clairement sensibilisés à ce sujet.
En revanche, il est nettement plus étonnant qu’un journal grand public et à diffusion nationale, tel que Libération, prenne le parti de parler de la net neutrality, en expliquant ce que c’est et en se payant le luxe de la défendre !
Dans un grand article titré « Menace dans les tuyaux », la journaliste Astrid Girardeau (officiant également pour le très intéressant Ecrans.fr) nous explique que « l’accès égal au réseau est un principe fondateur d’Internet que certains gros diffuseurs aimeraient bien saper ». Et de faire dans la pédagogie sans pour autant sacrifier en précision : « Tout comme l’autoroute A10 ne peut pas passer un accord exclusif avec Renault pour fournie une voie spéciale réservée aux seuls véhicules Renault, l’opérateur SFR ne peut pas favoriser l’accès aux contenus Vivendi et dégrader ou bloquer l’accès à ceux de Bouygues ».
Si la neutralité est un concept vital, il n’en est pas moins difficile à faire accepter aux opérateurs (qui n’y voient pas toujours leurs intérêts personnels) et aux pouvoirs publics (qui ne sont pas toujours suffisamment au fait des nouvelles technologies pour en comprendre l’intérêt). Libération rapporte cependant des propos de Nathalie Kosciusko-Morizet (Secrétaire d’Etat au développement de l’économie numérique) : « C’est la responsabilité de la puissance publique d’encadrer la neutralité […]. A moins qu’on accepte un Internet limité. Ce n’est pas ma position ».
D’aucuns, comme Jérémie Zimmermann (la Quadrature du Net), espèrent pouvoir faire introduire la notion de neutralité du net au sein du paquet télécom européen, en provoquant une prise de conscience politique. Cela risque cependant de ne pas être simple, car « la neutralité du net [est] mise à mal dans le paquet télécom sous la pression d’AT&T et du régulateur anglais Ofcom », selon ses propres dires.
On peut comprendre tout l’enjeu qui se trame autour de cette question de neutralité du réseau. C’est d’autant plus vrai pour les accès à Internet sur mobile, qui sont pour la plupart à des années-lumière de ce qu’on attend d’un Internet neutre. Comme l’indique Benjamin Bayart (président de FDN) dans l’interview suivant l’article, « quand un marchand d’accès à Internet interdit d’utiliser la téléphonie d’un autre opérateur, c’est une entrave à la concurrence. Or, SFR empêche l’utilisation de Skype. C’est contraire aux textes européens sur la libre concurrence. Ensuite, empêcher d’utiliser Skype, c’est du filtrage. Or, pour conserver sa licence, un opérateur doit être neutre vis-à-vis du contenu transporté. Quand vous regardez les offres illimitées, il y a en fait une liste exhaustive de services autorisés »…
Source : Libération du 17 septembre 09