Un régulateur sachant réguler…
En début de semaine, une décision de la cour d’appel fédérale de Washington a bousculé l’avenir de la neutralité du net aux Etats-Unis. Il y a été stipulé que le régulateur américain des télécoms, la FCC (l’équivalent de notre Arcep), n’avait pas le droit d’agir à l’encontre de restrictions de la part des fournisseurs d’accès (en l’occurence Comcast)…
Tout commence en 2007 lorsque le FAI Comcast décide de bloquer l’accès au protocole de P2P Bittorrent. Rapidement mis en cause par la FCC, ainsi que par des associations de consommateur (Free Press et Public Knowledge), l’opérateur finit par porter l’affaire devant la justice.
La Cour d’appel a finalement rendu son verdict et il est sans appel : selon elle, la FCC n’a pas le droit de réguler la gestion des réseaux faite par les FAI.
On sait que la FCC avait permis assez tôt de sensibiliser l’opinion publique à la neutralité des réseaux, en proposant une vraie réglementation à ce sujet, à inscrire dans la loi. Depuis, les Etats-Unis se sont positionnés, parfois avec le soutien de grandes entreprises qui y voient là un intérêt financier (Google, Yahoo…), comme pionniers de la neutralité du net. Celle-ci avait même été un des thèmes de campagne de l’actuel président, Barack Obama. Mais désormais, si le régulateur n’a pas le droit d’exercer une certaine autorité sur ce que les fournisseurs vendent et proposent en termes de trafic… qui le fera ?
En tout état de cause, il reste plusieurs possibilités de recours à la FCC.
La première serait de faire appel de la décision, auprès de la Cour suprême. Néanmoins, une telle procédure prendrait plusieurs années, avec un résultat qui n’est finalement absolument pas garanti.
La FCC pourrait demander plus de pouvoir directement après du Congrès américain, afin que sa faculté d’agir en faveur de la neutralité du net soit clairement inscrite dans une loi. Néanmoins, là encore, une telle procédure aurait peu de chances d’aboutir ; le lobby des télécoms (en particulier AT&T, le principal opérateur national) est très puissant aux USA, et un tel texte ne passerait certainement jamais auprès du Sénat.
La dernière option, jugée la plus probable, serait d’obtenir une requalification des accès Internet. Actuellement, ceux-ci sont définis comme des “services d’information” après de la FCC. Les requalifier en tant que “réseau de télécommunications” (à la manière de la téléphonie) pourrait permettre au régulateur de disposer d’un bien plus grand pouvoir d’action.
Malgré les pressions effectuées de la part des fournisseurs d’accès à l’encontre d’une telle mesure, il suffirait d’un vote parmi les cinq commissaires à la tête de la FCC (nommés par le président) pour mettre en place cette requalification. Trois voix favorables suffiraient… Selon les observateurs, la position de Barack Obama devrait beaucoup influencer ce scrutin, perçu comme la « dernière chance » de la neutralité des réseaux aux USA…
Source : Mother Jones