Un décret, publié au Journal Officiel de samedi vient définir le terme de « négligence caractérisée », qui sera décisif dans le contexte de la loi Hadopi.
La loi Hadopi prévoit qu’un utilisateur pourra être sanctionné pour un téléchargement effectué sur son accès Internet, même s’il clame son innocence, en cas de « négligence caractérisée » de sa part.
La définition officielle de ce terme est pourtant floue et laisse planer de nombreux doutes. Selon le décret, une négligence caractérisée intervient dès lors que l’abonné n’a pas mis en place, ou d’avoir « manqué de diligence » dans la mise en place d’un « moyen de sécurisation » de l’accès à Internet.
Toujours selon les termes du décret, ce moyen de sécurisation doit permettre d’empêcher l’utilisation de l’accès Internet « à des fins de reproduction, de représentation ou de mise à disposition ou de communication au public d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin sans l’autorisation des titulaires des droits […] lorsqu’elle est requise ». En d’autres termes : le titulaire de l’accès ne doit plus être en mesure de partager des fichiers protégés par le droit d’auteur sans autorisation des ayants-droits.
Cette définition peut laisser perplexe : quel type de logiciel serait en mesure de réaliser un tel filtrage, en différenciant les fichiers “légaux” des fichiers “illégaux” ? Et surtout, comment garantir une protection de l’ensemble de l’accès Internet domestique (ce qui est bien le sens de ce décret) avec un logiciel de sécurisation qui ne serait installé sur des postes clients ?
Puisque les termes employés font clairement mention d’une « mise à disposition » des fichiers (et non simplement de téléchargement), on peut très raisonnablement penser qu’un logiciel capable de bloquer l’exécution des softs peer to peer fera l’affaire… même s’il empêchera dans le même temps les utilisateurs d’avoir un usage tout à fait légal de ces réseaux, et ainsi, de télécharger de la musique librement mise à disposition par son auteur, ou encore des logiciels mis à disposition via Bittorrent, eMule…
Encore une fois, cela ne permet de sécuriser que le poste sur lequel cette solution est installée, et ne met pas à l’abri d’une intrusion sur le réseau wifi… sur ce point, la loi reste très floue.
Il convient de noter que la négligence caractérisée ne pourra être déclarée qu’après l’envoi de deux recommandations, espacées d’un an, au titulaire de l’accès Internet par la commission de protection des droits. Ces recommandations rappelleront à l’utilisateur qu’il doit mettre en place une solution de sécurisation, telle que décrite plus haut. Il sera donc impossible d’être pris au dépourvu.
Dernier point : la négligence caractérisée ne pourra être prononcée si le titulaire de l’accès dispose d’un « motif légitime ». Là encore, on nage en plein brouillard, puisqu’aucune précision n’est faite à ce propos… mais peut-être pourra-t-on considérer l’intrusion illégale sur un réseau wifi (protégé par une clé de sécurisation) comme un motif légitime, si un logiciel de sécurisation était bien installé sur les ordinateurs de l’utilisateur.
Dans tous les cas, il appartiendra au juge de se prononcer au cas par cas, et ce, quoi qu’en dise la Hadopi…
Source : Legifrance (via PC INpact)