La veuve, l’orphelin et la net-neutrality
Cogent, opérateur américain de transit pour des sites importants tels que Megaupload, a récemment porté plainte contre Orange devant l’Autorité de la concurrence française, pour « abus de position dominante ».
Dans une interview consacrée aux Échos, Vincent Tessier, directeur marketing de Cogent France, justifie le choix de la société. S’il ne mâche pas ses mots envers Orange, qui « dégrade volontairement l’accès à Internet » selon lui, il n’hésite pas non plus à qualifier Cogent de « garant de la neutralité du net »…
Extraits choisis :
Pouvez-vous nous apporter des précisions sur l’activité de Cogent ?
Cogent est un opérateur télécom international. Nous avons un réseau en fibre optique avec des routeurs qui orientent le trafic au bon endroit, sans regarder son contenu. Nous vendons de la bande-passante, nous connectons nos clients à Internet. Nos clients sont à la fois des fournisseur d’accès à Internet (FAI) et des fournisseurs de contenu. Le marché du transit est essentiel au bon fonctionnement d’Internet car il garantit la neutralité des flux. En tant que transiteur, Cogent est garant de la neutralité du net.
Pourquoi Cogent juge-t-il qu’il y a une distorsion de concurrence ?
Orange ne fait pas les investissements nécessaires pour avoir une capacité suffisante d’interconnexion. Il dégrade ainsi volontairement l’accès à Internet. Orange a une particularité, c’est un fournisseur d’accès à Internet qui a sa propre filiale d’opérateur de transit : OpenTransit. En général, les FAI font appels à plusieurs opérateurs de transit, qu’ils payent, pour se connecter aux autres réseaux mondiaux et écouler leur trafic. Or, OpenTransit est l’opérateur de transit exclusif d’Orange. Ce n’est pas un opérateur de transit normal, compétitif. D’ailleurs, il n’opère pas sur d’autres marchés ailleurs dans le monde comme les autres acteurs du secteur. La plupart de ses clients sont des filiales de France Télécom. Sa seule raison d’être est de donner accès aux utilisateurs Orange et éventuellement de monnayer cet accès. Orange nous dit : « si vous voulez accéder à mes clients, il va falloir payer » (…)
Avez-vous rencontré ce type de situation avec d’autres opérateurs dans le monde ?
Globalement, ce sont les opérateurs historiques européens qui ont le plus tendance à vouloir protéger leur base de client. Orange, avec 45% de part de marché en France, a assez de part de marché pour s’imposer. C’est la société qui nous pose le plus de problème. Cette plainte n’est pas opportuniste, elle touche la question de la neutralité du net.