Merci qui ? Merci Hadopi
Avec la mise en place du système de surveillance de l’Hadopi, les utilisateurs se sont tournés vers des moyens de téléchargement leur permettant de passer à travers les mailles du filet. Problème : ces nouveaux usages représentent un coût non-négligeable pour les fournisseurs d’accès…
C’est la fin d’une ère : celle du peer-to-peer où eMule et autres Bittorrent régnaient en maîtres. Conscients que ces réseaux constituent à eux seuls le périmètre de surveillance de l’Hadopi, les utilisateurs ont déporté leurs usages vers les sites de streaming et de téléchargement direct — Megavideo et Megaupload sont désormais les nouvelles technologies des pirates au quotidien…
Or, pour les fournisseurs d’accès, ce changement est une catastrophe : là où le P2P représentait des échanges essentiellement symétriques (les utilisateurs envoient autant qu’ils reçoivent), le téléchargement direct et le streaming détruit cet équilibre. Le trafic en download étant en pleine explosion, les accords de trafic entre les opérateurs coûtent de fait beaucoup plus cher aux fournisseurs français, ainsi que le constate le site Numerama dans son analyse.
Ce n’est pas la première fois que ce problème est évoqué ; Free évoque déjà depuis longtemps ce danger, en pointant du doigt la dissymétrie croissante des usages, par exemple sur des sites tels que Youtube.
La constatation est d’autant plus vraie pour les abonnés en zone non-dégroupée, dont l’opérateur doit financer l’accès selon la quantité de trafic utilisé chaque mois. Voilà qui expliquerait en partie — parmi d’autres raisons comme l’arrivée constante de nouvelles taxes — pourquoi Free, jusqu’à présent fidèle à son tarif unique de 29,99 €/mois, a été contraint de majorer l’abonnement de tous les non-dégroupés de 5,99 € supplémentaires, se rapprochant ainsi des tarifs des FAI concurrents…
Alexandre Archambault, responsable des affaires réglementaires de Free, tend à corroborer cette vision des choses sur Twitter. Si les non-dégroupés doivent aujourd’hui mettre la main au porte-monnaie, c’est parce que la hausse était devenue inévitable et non à cause de l’arrivée des appels mobiles inclus dans leur forfait : « du fait de l’explosion de la consommation (merci Hadopi) en non dégroupé, le mouvement tarifaire était inéluctable », explique-t-il sur Twitter. Avant d’ajouter, alarmiste, que « ce qui se passe en non dégroupé donne un aperçu du mouvement d’ensemble si rien n’est fait pour assainir l’interconnexion IP »…
PC INpact relève enfin que le ministre de l’Industrie et de l’Économie numérique Éric Besson lui-même a fini par admettre que la mise en place de l’Hadopi représentait une « charge » pour les fournisseurs d’accès. C’est la première fois qu’un membre du gouvernement évoque clairement cette réalité ; le ministère de la Culture défendait au contraire l’idée que l’Hadopi permettrait de mettre un frein à l’utilisation de la bande passante à des fins de piratage et, ainsi, représenter des économies pour les opérateurs…
Si les effets réels de l’Hadopi sur le piratage demeurent encore à démontrer, le constat fait par les abonnés est beaucoup plus tangible : en l’espace d’une seule année, combinée à une hausse de TVA, l’arrivée de l’Hadopi a fait grimper le prix moyen d’un abonnement haut débit de 2 à 10 euros en moyenne, quel que soit l’opérateur. Amer bilan…