Au royaume d’Ubu
La Cour d’appel de Paris a rejeté les demandes de l’opérateur Darty Telecom, qui s’interrogeait sur la légalité des actions de l’ARJEL (Autorité de régulation des jeux en ligne), notamment en termes de présomption d’innocence et d’indemnisation des opérateurs — sommés de bloquer gratuitement les sites contrevenants.
L’ARJEL ordonne régulièrement aux opérateurs français le blocage de sites Internet ne disposant pas de l’agrément nécessaire à la mise en place de jeux en ligne ou de paris sportifs à destination de la France.
Généralement, les opérateurs sont assignés par l’ARJEL, aux côtés des sites incriminés, afin que la décision de justice leur ordonne la mise en place de ce blocage technique. Bon gré mal gré, les opérateurs sont bien contraints de se plier à la décision rendue par le Tribunal…
Cependant, l’opérateur Darty Telecom avait tenu à soulever deux points problématiques suite à l’affaire condamnant le site Stanjames. Le FAI avait formulé une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) en appel, dans lequel il mettait en doute le bon respect de la présomption d’innocence de la part de l’ARJEL, et soulignait l’absence d’indemnisation des FAI malgré les blocages techniques à mettre en place.
La Cour d’appel a rejeté cette question dans son ensemble. Sur la présomption d’innocence, elle a estimé que l’ARJEL « s’appuie sur la constatation d’un fait objectif », c’est-à-dire l’absence d’agrément pour le site concerné par l’action en justice. Puisque les mesures de l’ARJEL n’ont pas un caractère répressif pour la société visée, la présomption d’innocence est bien respectée.
Enfin, Darty estimait que les opérateurs ne peuvent être contraints à travailler gratuitement pour l’ARJEL, qui les somme de mettre en place les mesures techniques nécessaires au blocage. Bien qu’une indemnisation soit bien prévue par la loi sur les jeux en ligne, le décret nécessaire à son application n’a jamais été publié. La Cour d’appel a estimé que cela n’était pas suffisant pour rendre la loi inapplicable, du moins pour le moment ; les Questions Prioritaires de Constitutionnalité ne peuvent en effet s’appliquer qu’aux lois et non aux textes réglementaires (décrets).
Les opérateurs devront donc continuer à mettre en place les blocages demandés par l’ARJEL, sans aucune compensation financière, faute de décret…
Source : PC INpact