La bataille autour de la neutralité du Net aux États-Unis connaît un nouvel épisode. Plusieurs groupes d’intérêt public ont demandé à la Cour d’appel du 6e circuit de réexaminer une décision qui bloque le rétablissement des règles historiques de l’Internet ouvert. Cette décision remet en cause l’autorité de la Federal Communications Commission (FCC) et pourrait marquer un tournant dans la régulation du Web.
Une décision très controversée
En janvier 2025, un panel de trois juges a statué que la FCC ne disposait pas de l’autorité légale pour rétablir les règles de neutralité du Net mises en place en 2015 sous l’administration Obama, puis abrogées sous Donald Trump. Cette décision constitue un revers pour l’administration Biden, qui avait fait de la restauration de ces règles un objectif politique majeur.
Les groupes Free Press, Public Knowledge, Open Technology Institute et Benton Institute for Broadband & Society estiment que cette décision est en contradiction avec des précédents judiciaires. Ils affirment que l’objectif de la neutralité du Net est de protéger les utilisateurs contre des pratiques abusives des fournisseurs d’accès à Internet (FAI), telles que le blocage ou le ralentissement des contenus, qui pourraient être motivées par des intérêts économiques ou politiques.
Les enjeux de la neutralité du Net
Les règles de neutralité du Net interdisent aux FAI de discriminer les flux de données en fonction de leur origine ou de leur contenu. Elles empêchent, par exemple, un opérateur d’offrir un accès plus rapide à un service qu’il possède ou de ralentir un concurrent. L’absence de ces règles pourrait permettre à des géants des télécommunications de favoriser leurs propres plateformes au détriment des utilisateurs et des petits services en ligne.
Alors que la décision de la cour d’appel empêche la FCC de rétablir ces règles à l’échelle fédérale, certains États, comme la Californie, ont adopté leurs propres régulations. Cependant, une absence de régulation fédérale pourrait créer une fragmentation du cadre juridique aux États-Unis, compliquant l’application de ces protections à l’échelle nationale.
Un enjeu économique et politique
Le sujet divise également les entreprises du secteur technologique. Des entreprises comme Amazon, Apple, Alphabet (Google) et Meta soutiennent les règles de neutralité du Net, estimant qu’elles garantissent un Internet libre et accessible. En revanche, des groupes industriels représentant des FAI, comme USTelecom (qui inclut AT&T et Verizon), considèrent le rétablissement de ces règles comme une ingérence réglementaire inutile et contre-productive.
Un modèle transposable en France ?
La neutralité du Net est un principe inscrit dans le droit européen depuis 2015. La réglementation de l’Union européenne impose aux fournisseurs d’accès un traitement égal des flux de données, sans discrimination ni restriction. L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) veille à son application en France.
Toutefois, la question de la contribution financière des grandes plateformes aux coûts d’infrastructure des réseaux est débattue en Europe. Certains opérateurs télécoms militent pour une participation financière des GAFAM, arguant qu’ils sont les principaux consommateurs de bande passante. Un débat qui pourrait influencer l’évolution de la neutralité du Net en France et en Europe.
Résumons-nous : le combat est toujours en cours
Le rejet des règles de neutralité du Net par la cour d’appel américaine relance le débat sur la régulation de l’Internet. Alors que les acteurs de la tech et les défenseurs des droits numériques plaident pour un retour à une réglementation stricte, les fournisseurs d’accès à Internet contestent une régulation qu’ils jugent contraignante et injustifiée.
En France et en Europe, la neutralité du Net bénéficie d’un cadre législatif stable, mais la pression des acteurs économiques pourrait faire évoluer les équilibres actuels. Reste à voir si les décisions américaines influenceront à terme le modèle européen.