Pour mieux assurer l’accès à un Internet ouvert, l’ARCEP voudrait pouvoir réguler les terminaux (smartphones, tablettes…), au-delà de ses prérogatives.
Dans un long rapport de 73 pages, l’Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) tente de sensibiliser à l’importance des terminaux dans l’expérience utilisateur. Nos smartphones, tablettes, objets connectés et autres assistants vocaux sont qualifiés de « maillons faibles de l’ouverture d’Internet ». Une problématique légitime, dont l’ARCEP entend bien s’emparer.
Son rapport, détaillé, isole un certain nombre de problèmes qui seront amenés à se développer à l’avenir, à mesure que l’Internet mobile devient dominant face aux ordinateurs « traditionnels ». On peut les résumer en trois grandes catégories :
- les magasins d’applications, gérés par les constructeurs de manière souvent opaque. S’il est parfois possible de s’en passer (magasins d’app alternatifs ou applications téléchargées individuellement sous Android), ils sont parfois incontournables, comme c’est le cas chez Apple (iOS).
- les systèmes d’exploitation, et le champ des possibles qu’ils offrent aux utilisateurs. Cette réflexion prend en compte les apps et services préinstallés sur les terminaux, là encore parfois sans possibilité de les désinstaller ou d’opter pour une solution alternative.
- les terminaux du futur, qui se penchent sur les usages encore peu ou pas développés. Par exemple, les véhicules autonomes, les objets connectés… Comment doivent-ils être pris en compte et quel impact auront-ils sur le réseau ?
Ironiquement, les box des opérateurs Internet, qu’on imagine pourtant concernées au premier plan par cette réflexion, ne sont quasiment pas évoquées. Le rapport évoque leur existence au détour d’une note, mais préfère se focaliser sur la mainmise des écosystèmes Apple, Android, Amazon, etc. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur les plateformes très fermées que sont les Freebox, Livebox, etc.
Il faut probablement y voir un message un brin politique, à l’heure où les GAFA sont pointés du doigt par le pouvoir en place. Ce parti-pris est complètement assumé par le régulateur, avec une tribune, publiée sur le site de l’Obs, au titre évocateur : « Les Gafa règnent sur nos smartphones, reprenons le contrôle ! ».
Vers une extension du domaine de régulation de l’ARCEP ?
Graduellement de plus en plus présent sur ce sujet depuis l’arrivée de son président Sébastien Soriano en 2015, l’ARCEP avait déjà publié un premier rapport consacré aux terminaux, et y a consacré divers ateliers tout au long de 2017.
En filigrane, pour l’ARCEP, il s’agit bien d’étendre son champ d’action à un domaine qui ne relève, en théorie, pas de ses prérogatives. Bien que son rôle soit purement consultatif à ce titre, le régulateur argue que « la chaîne d’accès à internet ne s’arrête pas aux réseaux d’accès » et entend être l’acteur de cette réflexion à mener. Voilà qui n’est pas sans rappeler, dans un autre genre, la vieille bataille menée par le CSA pour réguler le net, alors même que cela ne fait pas partie de ses missions initiales.