Cela fait maintenant un certain nombre d’années que les opérateurs attirent l’attention sur le volume de données qui transitent sur leurs réseaux respectifs, issus pour une majeure partie des géant de la Tech comme du e-commerce : en d’autres termes, des GAFAM.
Xavier Niel en son temps, soit il y a maintenant presque 13 ans, avait tiré la sonnette d’alarme, en attirant l’attention sur les problématiques engendrées par l’occupation excessive de la bande passante par Google ou encore YouTube, s’attirant les foudres d’abonnés comme du gouvernement en place, en limitant leur flux en amont.
En cause, pour certains, une atteinte manifeste à la neutralité du net, principe derrière lequel pourtant se cachent les plateformes pour outrepasser un usage normal des réseaux mis à leur disposition tout en faisant des bénéfices au sus et au vu des opérateurs. Et la pilule passe mal.
Or, force est de constater que plus d’une décennie plus tard, la difficulté n’est pas surmontée, voire s’est enlisée, avec 55% du trafic occupé par l’ensemble des GAFAM, Google et YouTube en tête, ce qui commence à devenir ingérable pour les opérateurs, qui dénoncent unanimement le surcoût engendré, sans pour autant qu’Amazon, Facebook ou bien encore Netflix, mettent la main à la poche pour en résorber une partie.
La facture est lourde : de l’ordre de 15 à 28 milliards d’euros par années, générant par voie de conséquence non seulement des dépenses que les opérateurs n’entendent plus assumer, mais également des difficultés dans le recrutement de salariés supplémentaires, au regard de l’enveloppe qui y est consacrée et qui représente l’équivalent de 840 000 collaborateurs supplémentaires sur les 3 prochaines années, si on devait évaluer le manque à gagner en termes de masse salariale.
Deuxième point non négligeable : l’impact carbone dégagé par cette surconsommation et qui pourrait être réduit considérablement à grand renfort de réinvestissement dans des technologies plus propres et moins gourmandes.
La stratégie des GAFAM : de l’invitation pure et simple, aux pieds sur le canapé ..
En d’autres termes : la situation ne relève plus simplement d’une question d’éducation de la part des géants américains, mais d’une véritable stratégie économique, car même si les GAFAM investissent, ce n’est que dans le développement de leurs propres infrastructures sans pour autant penser participer au fonctionnement de l’acheminement primitif des données via les réseaux entretenus par les opérateurs et mis à leur disposition pour des usages qui se révèlent bien au delà des conventions initialement conclues.
Si tant est que ces conventions aient été véritablement conclues et en connaissance de cause car pour les opérateurs, cette main à la poche des GAFAM serait une contribution légitime et équitable, les réseaux représentant une plus value non négligeable dans l’acheminement des données, leur permettant de réaliser leur chiffre d’affaires.
Il y a quelques mois de cela, Orange avait tenté d’attirer l’attention mais en vain, du législateur qui de son côté estime que cette participation serait « juste et proportionnée aux coûts des biens, services et infrastructures publics ».
Du côté de la Commission européenne à la concurrence, le discours est limpide, Margrethe Vestager reprenant elle-même les arguments des opérateurs en ce sens :
« Je pense qu’il y a une question que nous devons examiner avec beaucoup d’attention, et c’est la question de la contribution équitable aux réseaux de télécommunication […] nous voyons qu’il y a des acteurs qui génèrent beaucoup de trafic pour leur business mais qui n’ont pas contribué pour le faire transiter. Ils n’ont pas contribué à permettre des investissements dans les déploiements [et l’Europe] est dans un processus de compréhension du secteur pour voir comment cette contribution pourrait être mise en place » a-t-elle elle-même déclaré en début de semaine.