Le Conseil d’État a rejeté ce mercredi les recours en référé déposés par les chaînes C8, NRJ12 et Le Média, qui n’avaient pas été sélectionnées cet été par l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, lors de la procédure de réattribution des fréquences de la TNT. La plus haute juridiction administrative française a estimé que la condition d’urgence n’était « pas remplie ». Cependant, cette décision en référé ne signifie pas que les requérants ont perdu toute possibilité de recours. En effet, le Conseil d’État a décidé d’examiner le dossier au fond, tenant compte de l’importance des questions soulevées.
Le Conseil d’État actionne la procédure de « passerelle »
Face à la complexité et à la gravité des enjeux, le Conseil d’État a activé la procédure dite de « passerelle », qui lui permet de traiter un dossier de manière accélérée, mais au fond. Cela signifie que, bien que la procédure d’urgence n’ait pas été retenue, l’affaire ne s’arrête pas là. Le Conseil d’État prévoit d’examiner les recours de manière approfondie et rendra une décision sur le fond d’ici la fin du mois de novembre.
Le contexte : la réattribution des fréquences TNT en 2025
L’été dernier, l’Arcom avait dévoilé sa sélection préliminaire pour la réattribution de 15 fréquences de la télévision numérique terrestre (TNT), prévue en 2025. Parmi les chaînes non retenues figurent C8, propriété du groupe Canal+ de Vincent Bolloré, et NRJ12, appartenant à NRJ Group. Le Média, une webtélé de gauche radicale, n’a pas non plus été sélectionné. À la place, deux nouveaux acteurs feront leur entrée sur le marché de la TNT : OFTV, qui appartient au groupe Ouest France, et RéelsTV, une chaîne du groupe CMI France, détenu par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.
Les chaînes sélectionnées ne pourront néanmoins commencer à émettre qu’après avoir signé de nouvelles conventions avec l’Arcom, ce qui devrait se finaliser d’ici la fin de l’année 2024. Cette réattribution des fréquences TNT est cruciale, car la TNT, lancée en 2005 en France, reste un mode de réception de la télévision essentiel pour près de 20 % des foyers français.
La bataille juridique en cours
Dès l’annonce de la décision de l’Arcom en juillet, NRJ Group, propriétaire de NRJ12, a saisi le Conseil d’État afin de contester l’exclusion de sa chaîne. Peu après, C8 a suivi cette démarche. La chaîne, qui cumule 7,6 millions d’euros d’amende en raison des controverses liées à son animateur vedette Cyril Hanouna, a fait valoir dans un communiqué une situation « particulière au regard des enjeux économiques, sociaux et concurrentiels » pour une chaîne existant depuis près de deux décennies. Canal+, maison-mère de C8, s’est montrée particulièrement préoccupée par les répercussions que cette exclusion pourrait avoir sur l’avenir de la chaîne.
Le Média, de son côté, dénonce une décision qu’il juge politique. La chaîne, qui se revendique de la gauche radicale, voit dans cette exclusion un signal inquiétant concernant la pluralité des voix dans le paysage audiovisuel français.
Une affaire aux répercussions politiques
La réattribution des fréquences TNT ne se limite pas à un enjeu purement économique pour les groupes audiovisuels concernés. Cette décision a également pris une dimension politique. Le député de la France Insoumise (LFI), Aurélien Saintoul, rapporteur d’une commission d’enquête sur la TNT, a critiqué le choix de l’Arcom de retenir la candidature de CNews, une chaîne accusée par des politiques de gauche de diffuser des idées proches de l’extrême droite, accusations que CNews rejette.
La chaîne, qui fait également partie du groupe Canal+ de Vincent Bolloré, suscite des débats quant à son rôle dans le paysage médiatique français, particulièrement à l’approche des échéances électorales majeures.
L’avenir des chaînes non retenues
La bataille juridique se poursuit, et le verdict attendu du Conseil d’État sur le fond en novembre sera déterminant pour l’avenir des chaînes concernées. Une décision en leur faveur pourrait bouleverser les équilibres actuels et remettre en question les choix de l’Arcom. En attendant, C8, NRJ12 et Le Média continuent à plaider leur cause, espérant obtenir gain de cause avant l’échéance de 2025.