Constatant le « retard français qui s’accumule » sur l’adoption de l’IPv6, l’Association des Opérateurs Télécoms Alternatifs (AOTA) propose la mise en place de nouvelles mesures à l’ARCEP.
Si la France a un temps fait figure de pionnière en matière de déploiement de l’IPv6, en partie grâce à Free, ce n’est désormais plus le cas. Dans un communiqué, l’AOTA (qui regroupe plus d’une trentaine d’opérateurs commerciaux régionaux ou multi-régionaux) constate le retard pris en matière d’adoption de l’IPv6 sur l’ensemble du secteur.
Ce retard a des conséquences multiples, que l’association énumère :
- pour les utilisateurs, des différences de qualité peuvent être constatées entre IPv4 et IPv6 sur certains services (on a pu le voir récemment avec Netflix), faute d’infrastructures correctement dimensionnées pour accueillir la même quantité de trafic en v6
- toujours côté grand public, il n’est plus rare qu’une seule adresse IPv4 soit désormais partagée entre plusieurs utilisateurs, pour pallier à la pénurie. Chez Free, c’est systématiquement le cas pour les accès fibre en zone ZMD Orange, et cela semble progressivement concerner de plus en plus de nouveaux abonnés en général sur l’offre Freebox.
- pour les professionnels, notamment le marché B2B, les désagréments sont nombreux : pour eux, il devient difficile d’obtenir des plages d’adresses IPv4, sauf à des prix élevés sur le « marché gris ».
Une régulation encore trop laxiste
Depuis le 1er janvier 2018, la régulation européenne qui impose à tout opérateur ou équipementier de vendre ou louer des produits compatibles avec le protocole IPv6. Cette mesure, qui devait permettre de basculer plus rapidement vers le tout-IPv6, n’est pourtant pas toujours respectée. L’AOTA constate que ce n’est pas le cas chez certains fournisseurs d’accès, fixes ou mobiles.
Bien que l’ARCEP (Autorité de régulation des télécoms) se soit emparée du dossier IPv6 depuis quelques années, l’AOTA considère à demi-mot que son action n’est pas suffisante. Elle encourage le régulateur à mesurer la compatibilité native IPv6 des différents réseaux, ainsi que des terminaux vendus en France. À défaut de mise en conformité de la part des principaux acteurs du marché, le régulateur pourrait faire appel à ses pouvoirs de sanction.
À ces fins, l’AOTA propose à l’ARCEP la création d’un « comité d’experts IPv6 » qui pourrait réunir les principaux opérateurs ainsi que des équipementiers, des associations, des éditeurs de service, etc. Celui-ci pourrait travailler de concert avec ses homologues à l’international, afin d’organiser une migration vers IPv6 à grande échelle.
Adopter IPv6, ça urge !
Rappelons que le protocole IPv6 a pour objectif de remplacer définitivement les adresses au format IPv4, encore largement utilisées aujourd’hui pour désigner n’importe quelle machine en réseau : client, serveur, machine locale, etc. Les adresses IPv4 atteignent aujourd’hui l’épuisement, et bien que ce problème soit connu depuis de nombreuses années, peu d’opérateurs et d’équipementiers ont fait l’effort d’être pleinement compatibles avec IPv6.
Dans son observatoire 2017 de la transition vers IPv6, l’ARCEP (Autorité de régulation des télécoms) faisait un bilan d’étape peu encourageant. Free s’y distinguait avec un taux d’utilisation constaté de 35% en IPv6, contre 33% pour Orange. Très loin derrière, Bouygues Telecom et SFR n’en étaient qu’à leurs balbutiements en la matière : IPv6 représentait moins d’1% du trafic chez eux.