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Freebox Ultra : Bouygues Telecom attaque Free pour publicité mensongère autour du Wi-Fi 7.. mais est-ce fondé ?

La guerre du haut débit en France se joue désormais dans les prétoires : Bouygues Telecom a décidé de poursuivre Free devant le tribunal de commerce de Paris, l’accusant d’induire les consommateurs en erreur en annonçant la compatibilité Wi-Fi 7 de la Freebox Ultra. Une initiative qui met en lumière la rivalité historique entre les deux opérateurs et l’âpreté de la concurrence sur le terrain des nouvelles technologies.

D’après l’assignation révélée par L’informé, la plainte remonte à septembre dernier. Selon Bouygues Telecom, Free aurait mené une campagne marketing trompeuse, vantant un Wi-Fi 7 « partiel » et non certifié. La Wi-Fi Alliance, chargée de délivrer les précieuses validations, n’aurait jamais accordé cette reconnaissance à la Freebox Ultra ni à ses répéteurs.

Un Wi-Fi 7 jugé incomplet par Bouygues Telecom

Lors de la présentation de la Freebox Ultra en janvier 2024, Xavier Niel en avait fait un argument choc : « Être le premier au monde à proposer du Wi-Fi 7 dans une box. » Or, ce protocole de dernière génération repose sur l’exploitation de trois bandes de fréquences, dont le 6 GHz, jugé essentiel pour optimiser le débit et réduire la congestion du réseau.

Bouygues estime que les équipements de Free ne gèrent pas intégralement ces trois bandes, et que l’opérateur ne peut donc revendiquer pleinement la norme Wi-Fi 7. C’est là que le bât blesse : Bouygues Telecom reproche à son concurrent de surfer sur une promesse commerciale alléchante, sans disposer d’un produit entièrement conforme aux spécifications requises.

Dans le même élan, l’opérateur reproche à Free d’avoir cherché à dénigrer la concurrence. Lors du lancement de la Freebox Ultra, Xavier Niel avait égratigné les autres fournisseurs, leur reprochant de « ne pas voir l’intérêt de proposer du 10 Gb/s ». Pour Bouygues Telecom, cela constitue une atteinte à son image, assez significative pour s’ajouter au dossier.

Une rivalité qui ne date pas d’hier

Les passes d’armes entre Bouygues et Free ne sont pas nouvelles. Des promotions agressives aux critiques acerbes lors des lancements de box ou des déploiements fibre, les deux opérateurs s’écharpent depuis l’arrivée de Free sur le marché du mobile en 2012. Cette fois, la discorde porte sur la certification d’une technologie émergente : le Wi-Fi 7, censé révolutionner la connectivité domestique et répondre à l’explosion des usages (streaming UHD, jeux en ligne, domotique…)

En répliquant à l’argument de Free, Bouygues a lancé sa propre box, la Bbox Ultym WiFi 7, en insistant sur sa « véritable certification ». Pour marquer les esprits, l’opérateur n’a pas hésité à évoquer un « Wi-Fi 7 partiel ailleurs », visant directement l’offre de Free.

Un enjeu de marché pour les deux opérateurs

Cette confrontation judiciaire illustre un aspect majeur : la disparition progressive de l’ADSL et l’adoption massive de la fibre transforment le paysage. D’après l’Arcep, huit foyers sur dix disposent déjà de la fibre, et la facture moyenne ne cesse d’augmenter, autour de 36,80 € mensuels. Dès lors, proposer une box plus rapide et performante est devenu un argument marketing incontournable.

Pour Free, l’idée était de conserver son image de pionnier : après la fibre 10 Gb/s, la box ultra-puissante… et donc le Wi-Fi 7. Mais Bouygues estime qu’il y a tromperie sur la marchandise, et voit dans cette communication un moyen de saper la crédibilité de ses propres offres. De son côté, Free n’a pas encore confirmé les raisons exactes de l’absence de certification ni comment il entend défendre sa « labellisation » Wi-Fi 7.

Quels risques pour Free ?

Pour l’heure, impossible de savoir quel montant de dommages et intérêts Bouygues Telecom réclame. Les plaintes pour publicité mensongère, si elles sont retenues par la justice, peuvent se solder par des amendes significatives, en plus d’une mise en conformité des supports promotionnels.

Si Free se voit condamné, l’opérateur devra vraisemblablement rectifier toute communication insinuant la conformité intégrale de la Freebox Ultra au Wi-Fi 7. Reste à voir si l’affaire pourra se régler par un accord amiable, ou si elle débouchera sur un procès potentiellement long.

Dans un marché ultra-concurrentiel, chaque détail technologique compte. À l’heure où de plus en plus d’abonnés cherchent une connexion domestique irréprochable pour le télétravail, le gaming, ou encore le streaming en 8K, les opérateurs rivalisent d’annonces plus ou moins concrètes. Entre le gain marketing et les exigences réelles des normes, la frontière se brouille parfois.

Une affaire à suivre de près

Alors que ni Bouygues Telecom ni Free n’ont officiellement commenté cette affaire devant la presse, les prochaines semaines pourraient apporter des éclaircissements. On saura alors si la justice valide la plainte de Bouygues, estimant que Free a effectivement manqué de transparence, ou si l’opérateur de Xavier Niel parvient à prouver qu’il n’y a aucune tromperie factuelle.

En attendant, cette passe d’armes judiciaire témoigne d’un marché où l’innovation est aussi un levier publicitaire. Wi-Fi 7 ou non, la question reste de savoir si les abonnés, toujours plus demandeurs en débit, ressentiront concrètement cette avancée. La bataille pour le « meilleur des Wi-Fi » est manifestement loin d’être terminée.

Du côté des communautés d’utilisateurs, aucun vrai retour sur le sujet

Du côté des usagers et des remontées effectuée sur les forums, le seul point à souligner concerne les retours d’utilisateurs ayant rencontré des interférences avec leur domotique personnelle. Selon plusieurs témoignages, il ne s’agissait pas à proprement parler d’un problème lié au Wi-Fi 7, car aucun équipement compatible n’était présent dans ces logements. Les dysfonctionnements provenaient plutôt de certains « bugs de jeunesse » de la Freebox Ultra, liés à la gestion de l’énergie et des multiples fréquences. Au cours de l’été, Free a d’ailleurs diffusé une mise à jour corrigeant ces anomalies, tandis que les abonnés ont également affiné la configuration de leur domotique. Résultat : plus aucune interférence n’a été signalée depuis.

Cette anecdote illustre cependant un constat simple : Free, comme tout opérateur, cherche à faire évoluer la qualité de son Wi-Fi. Être le premier à proposer une nouvelle norme implique nécessairement un délai d’ajustement. Les “early adopters” qui optent pour un produit d’innovation, tel que ce Wi-Fi 7 naissant, s’exposent parfois à des itérations de firmware et de réglages avant d’atteindre un fonctionnement parfaitement fluide. Cependant, c’est souvent le prix à payer pour bénéficier d’un coup d’avance sur les usages futurs.

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