Avec l’essor des solutions d’intelligence artificielle (IA) et l’explosion des usages numériques, les géants du cloud comme Amazon Web Services, Microsoft, Google, Bytedance (TikTok), et Meta sont confrontés à des défis de taille. Bien que ces entreprises aient initialement fixé des objectifs ambitieux de neutralité carbone, la demande toujours croissante en puissance informatique compromet ces ambitions. Face à cette situation, le développement de nouveaux méga datacenters s’accélère, en particulier en France, où les plus récents nécessitent des raccordements électriques allant jusqu’à 200 MWh, soit l’équivalent de la consommation énergétique d’une ville comme Grenoble ou Angers.
Des infrastructures toujours plus gourmandes en énergie
La montée en puissance de l’IA impose une transformation des infrastructures numériques. Les fournisseurs de services cloud investissent massivement dans des serveurs GPU capables de traiter des ensembles de données toujours plus vastes et complexes. Selon les données de Exaegis Markess, plus de 50% des investissements des hyperscalers en systèmes serveurs en 2024 concernent désormais ces technologies. En conséquence, la consommation énergétique des datacenters, en France, augmente de 3% à 4% par an.
Cette croissance effrénée illustre bien les difficultés rencontrées par les entreprises pour concilier performance et responsabilité écologique. Par exemple, Microsoft a récemment révélé que ses émissions mondiales de CO2 avaient augmenté de 30% en seulement quatre ans, malgré les mesures mises en place pour les réduire. De son côté, Google a vu ses émissions augmenter de 48% depuis 2019.
Des impacts environnementaux inquiétants
Les infrastructures de cloud computing ne se contentent pas de consommer de l’énergie ; elles exigent également d’importantes ressources en eau. En Chine, le rapport China Water Risk de 2024 prévoit que les datacenters du pays utiliseront 3 000 milliards de litres d’eau d’ici 2030, soit l’équivalent de la consommation annuelle de l’Italie. Ce constat soulève des questions sur la viabilité environnementale à long terme des infrastructures numériques telles qu’elles sont conçues actuellement.
Les émissions carbonées liées à la filière numérique continuent également de croître. En France, elles représentent environ 2,5% des émissions nationales de gaz à effet de serre, selon une étude Ademe-Arcep de janvier 2022. Sans changement majeur, cette empreinte carbone pourrait augmenter de 45% entre 2020 et 2030, selon une mise à jour publiée en mars 2023. Cette trajectoire est incompatible avec les objectifs climatiques nationaux et internationaux, nécessitant une transformation urgente des pratiques.
La nécessité d’une sobriété numérique
Pour limiter ces impacts, des mesures rapides et concrètes doivent être mises en place à l’échelle de la filière numérique. Plusieurs bonnes pratiques commencent à émerger pour encourager la sobriété numérique :
- Sensibilisation et formation des utilisateurs sur la gestion responsable des ressources numériques.
- Optimisation de la durée de vie des équipements (postes de travail, serveurs, stockage) afin de minimiser leur impact environnemental.
- Choix de fournisseurs engagés pour un numérique durable.
- Adoption d’approches structurées comme FinOps (gestion financière du cloud) et GreenOps (gestion environnementale), pour mieux intégrer la maîtrise des coûts et de l’empreinte carbone dans les stratégies de cloud.
Ces pratiques deviennent des critères essentiels pour les organisations qui cherchent à minimiser leur empreinte écologique tout en optimisant leurs coûts cloud.
Une gestion responsable du cloud : quels objectifs ?
L’optimisation de l’usage du cloud doit désormais inclure à la fois des considérations financières et environnementales. Les entreprises doivent viser une gestion performante et durable de leurs ressources cloud, avec deux objectifs principaux :
- Gestion financière du cloud en maximisant la valeur métier tout en pilotant les dépenses via une analyse précise des coûts.
- Gestion environnementale du cloud en réduisant les émissions de carbone et améliorer l’efficacité énergétique, en utilisant des outils de gestion des coûts et des ressources cloud (AWS Cost Explorer, Azure Cost Management, etc.).
Les outils dédiés à la gestion et à l’optimisation des coûts du cloud, tels que KubeCost ou Datadog, jouent un rôle clé dans l’accomplissement de ces objectifs. En intégrant des métriques environnementales dans leur stratégie de FinOps, les entreprises peuvent suivre leur impact en temps réel et ajuster leurs ressources en conséquence.
Allier performance et responsabilité
L’augmentation constante des besoins en cloud, en particulier pour les solutions d’IA, met à l’épreuve les engagements écologiques des grandes entreprises technologiques. Pour répondre à ces défis, il est crucial d’adopter des stratégies de sobriété numérique et de mieux gérer les ressources cloud, tant sur le plan financier qu’environnemental. L’avenir des datacenters et du cloud computing dépend de la capacité des organisations à innover tout en réduisant leur empreinte écologique. La transformation numérique ne doit pas se faire au détriment de la planète.
Source Exaegis Markess