Saisie par Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin, l’Autorité de la concurrence a rendu son avis sur les conditions d’utilisation de l’itinérance chez Free Mobile, ainsi que ses potentiels risques pour la concurrence.
Dans ce rapport, elle souligne que l’itinérance « peut favoriser l’animation de la concurrence, notamment en abaissant les barrières à l’entrée pour un nouvel entrant ». C’est ce qui a motivé le droit à l’itinérance accordé à Free Mobile, nouvel entrant sur un marché déjà quasiment saturé. Sur ce point, l’Autorité ne trouve rien à redire.
Elle souligne cependant que l’itinérance doit « rester transitoire car elle présente aussi des risques concurrentiels » : elle contribue notamment à réduire la différenciation entre opérateurs, puisque certaines caractéristiques de l’offre de l’opérateur (qualité de service, débits, couverture…) se rapprochent logiquement de celles son l’opérateur d’itinérance. À terme, la collaboration entre deux acteurs du marché peut également provoquer un déséquilibre concurrentiel, au détriment des autres opérateurs.
Concernant Free, l’Autorité fixe une date-butoir, au-delà de laquelle l’itinérance 3G avec Orange ne pourra pas se prolonger : « 2016 – date à laquelle expirera le droit à l’itinérance 2G et s’ouvrira la fenêtre de résiliation prévue dans le contrat d’itinérance entre Orange et Free– ou 2018 – échéance prévue par ce contrat ». En tout état de cause, l’itinérance ne pourra pas être prolongée de quelques années supplémentaires…
L’Autorité recommande de vérifier que la « trajectoire d’investissement » prise par Free dès maintenant lui permettra d’atteindre « les obligations de sa licence ». Cette vérification devrait être menée par l’ARCEP (Autorité de régulation des télécoms), qui en a le pouvoir.
Enfin, elle recommande une extinction « progressive » de l’itinérance nationale, volontaire de la part de Free ou bien encadrée par les régulateurs s’il le faut. Elle suggère par exemple l’extinction de l’itinérance par zones, là où la couverture de Free est réputée couvrir une proportion suffisante de la population.
Sur la 2G, l’Autorité est plus clémente : Free ne bénéficie pas d’une telle licence, et l’extinction de l’itinérance dépendra de la proportion de téléphones compatibles 2G uniquement sur le marché d’ici quelques années, ce taux étant incertain. Pour cette raison, elle « considère que l’itinérance 2G, si elle devait être maintenue au-delà du droit qui est accordé jusqu’en 2016, devrait être limitée aux seuls clients disposant de terminaux 2G exclusifs ».
Pour terminer, enfin, sur la 4G, l’Autorité de la concurrence constate que Free dispose dans sa licence d’un droit à l’itinérance avec SFR dans les zones de déploiement prioritaire. En effet, Free ne dispose d’une licence 4G que sur la seule bande de fréquences 2600 MHz, et n’a pas été retenu sur la bande 800 MHz, contrairement à ses concurrents. Une telle licence pourrait augmenter le coût du déploiement pour Free, en particulier dans les zones peu denses ; l’Autorité est donc prête à considérer que le droit à l’itinérance vient compenser ce handicap.
Mais elle se montre également défavorable à l’autorisation d’une telle itinérance dans les zones denses, qui ne lui semble pas justifiée. Elle constate que le handicap de Free sur la 4G est en partie du à sa propre stratégie d’acquisition de licence, l’opérateur n’ayant pas souhaité miser une somme suffisante pour acquérir une licence sur la bande 800 MHz. Et « s’il était avéré que le déficit de fréquences de Free entraîne pour lui un risque sérieux de marginalisation », l’Autorité recommande « de compenser cet éventuel handicap par une réallocation de fréquences plutôt que par une itinérance en zones denses ».