Le processus de fermeture du réseau cuivre en France, amorcé en 2020, marque une transition majeure vers la généralisation de la fibre optique. Ce chantier, échelonné jusqu’en 2030, suit un calendrier structuré de fermetures commerciales et techniques, par lots de communes. Cependant, ce vaste projet, qui redéfinit les infrastructures de connectivité, soulève des défis techniques, organisationnels et logistiques significatifs, exacerbés par des problématiques de données incomplètes ou mal positionnées. Ce que l’on vous propose aujourd’hui c’est une analyse approfondie des enjeux et des besoins pour mener à bien cette transition.
Un calendrier en sept lots
Le plan de fermeture du réseau cuivre, piloté par Orange sous la supervision de l’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Électroniques, des Postes et de la Distribution de la Presse), est structuré en sept lots. Chaque commune est intégrée à un lot défini selon un calendrier progressif. Actuellement, les discussions portent sur le lot 4, marquant une étape importante vers l’accélération des fermetures commerciales et techniques.
Le rôle du démonstrateur cuivre/fibre
Un outil en ligne, hébergé par l’association OpenStreetMap France et développé bénévolement par François Lacombe, permet de visualiser l’état d’avancement des fermetures et des raccordements fibre par adresse. Bien que cet outil valorise les données disponibles, il reste limité par des contraintes d’accès à des informations clés. La comparaison entre les adresses desservies par le cuivre et celles raccordées à la fibre est cruciale pour garantir la complétude du réseau et éviter les zones blanches.
Problèmes identifiés : des adresses mal référencées
L’absence de données cuivre géolocalisées
Les adresses desservies par le réseau cuivre ne sont pas géolocalisées, ce qui complique leur alignement avec les adresses fibre issues de la Base Adresse Locale (BAL). Cette situation résulte d’un blocage de plusieurs années par l’Autorité de la Concurrence. Ce n’est qu’en 2023, après la décision 2023-2802 de l’ARCEP, qu’Orange a été contraint de publier ces données après une attente de 10 ans. Toutefois, le processus reste opaque : Orange utilise un algorithme non divulgué pour établir des liens entre les adresses cuivre et fibre.
Des erreurs dans les données d’adressage
Les problèmes récurrents incluent :
- Des adresses cuivre absentes, engageant une responsabilité directe d’Orange.
- Des adresses cuivre mal positionnées souvent liées à des erreurs dans la Base Adresse Locale.
- Des adresses fibre incorrectes, imputables aux Opérateurs d’Infrastructure (OI) responsables du déploiement de la fibre.
Ces erreurs peuvent entraîner des inversions de numéros entre les réseaux cuivre et fibre, notamment lorsque les deux réseaux ne sont pas correctement alignés. Un cas typique est observé lors des fusions de communes, où le regroupement administratif entraîne des incohérences dans l’attribution des numéros.
Des besoins fondamentaux en données pour une transition efficace
Pour résoudre ces problèmes, plusieurs besoins émergent.
Les adresses cuivre doivent être rapprochées de la Base Adresse Nationale (BAN). Cela nécessite la mise en place d’un identifiant national unique dans les fichiers de données, une tâche complexe mais essentielle.
Mais pas seulement : une concertation efficace entre Orange, l’ARCEP, et les collectivités locales est conjointement nécessaire pour résoudre les incohérences. Cependant, Orange se montre peu enclin à géocoder les adresses cuivre, compliquant davantage la tâche.
Enfin, les adresses fibre doivent être corrigées pour refléter les numéros exacts, en s’appuyant sur des outils comme Google Street View pour vérifier les informations sur le terrain.
Un exemple illustratif : le cas des adresses avec numéros zéro
Un problème typique survient lorsque certaines adresses fibre enregistrent des numéros zéro, tandis que les adresses cuivre correspondantes disposent des bons numéros. Cela empêche une correspondance claire entre les deux réseaux et complique la transition. Ce cas souligne le besoin urgent de compléter la BAL des communes concernées et de corriger les données fournies par les opérateurs d’infrastructure fibre.
Le défi de la coordination et de la complétude
La transition du réseau cuivre à la fibre repose sur une coordination efficace entre les différents acteurs et sur une transparence accrue dans la gestion des données. Toutefois, plusieurs obstacles demeurent et notamment le manque d’une structure de concertation dédiée. En effet, aucun cadre institutionnalisé n’existe pour réunir les parties prenantes autour d’un plan de correction des adresses.
S’agissant des zones déjà déconnectées du cuivre, il est également essentiel de recenser les adresses déjà déconnectées du cuivre en dehors des communes programmées pour les lots actuels.
Un projet d’avenir : anticiper les difficultés et moderniser les données
Le plan de fermeture du réseau cuivre et son remplacement par la fibre représentent une opportunité pour moderniser les infrastructures numériques en France. Cependant, cette transition ne pourra être réussie qu’en levant les obstacles liés aux données et en renforçant la coopération entre les acteurs publics et privés.
Un effort concerté est nécessaire pour s’assurer que chaque adresse, qu’elle soit cuivre ou fibre, soit correctement référencée et géolocalisée. Cela garantira non seulement une transition fluide, mais aussi l’accès équitable à la fibre optique pour tous les citoyens, entreprises, et administrations.
Source François Lacombe