Selon les derniers chiffres publiés par l’Arcep, la fin de l’année 2024 marque une avancée majeure : 91 % des 44,6 millions de locaux recensés en France sont désormais raccordables à la fibre optique. Autrement dit, plus de neuf foyers ou entreprises sur dix ont la possibilité de souscrire à une offre FTTH (Fiber to the Home). Ce jalon confirme la dynamique engagée depuis plusieurs années, même si 4 millions de locaux doivent encore être rendus éligibles. L’objectif affiché par les pouvoirs publics et les opérateurs est clair : parvenir à résorber le « reste à couvrir » et achever la bascule vers le très haut débit sur l’ensemble du territoire.
Le milieu particulièrement concurrentiel – où chaque opérateur multiplie les promotions ou les services associés (TV enrichie, support professionnel, etc.) – témoigne d’une volonté de conquérir les derniers segments de marché, y compris les zones les moins denses. Les entreprises, elles aussi, se montrent de plus en plus demandeuses de solutions fibre pour soutenir le télétravail, la visioconférence ou la migration vers le cloud.
Un rythme qui ralentit, malgré un objectif ambitieux
La fin de l’année 2024 a été marquée par un ralentissement : 680 000 locaux ont été rendus raccordables au cours du quatrième trimestre, soit 32 % de moins qu’à la même période en 2023. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette baisse : maturité des grandes agglomérations déjà couvertes, difficultés logistiques dans des zones rurales, ou encore moindres incitations financières à déployer dans des secteurs plus complexes.
Dans le détail, on note que les Réseaux d’Initiative Publique (RIP) ont, sur le dernier trimestre, permis d’ajouter 370 000 nouveaux foyers et entreprises éligibles. Les zones dites « moins denses d’initiative privée » en totalisent 210 000, quand les territoires AMEL (appels à manifestation d’engagements locaux) et les communes très denses affichent chacun 50 000 supplémentaires.
Pour les professionnels comme pour les particuliers, l’intérêt de la fibre réside non seulement dans la vitesse de téléchargement, mais aussi dans la stabilité de la connexion – primordiale pour la visioconférence ou la télémaintenance par exemple. L’objectif est que ces 4 millions de locaux restants puissent être couverts d’ici quelques trimestres, au gré des investissements consentis par les opérateurs et les collectivités locales.
Une couverture THD qui dépasse la fibre
Au total, 94 % des locaux sont aujourd’hui éligibles au « très haut débit » (THD) filaire, une catégorie qui inclut la fibre optique, mais aussi la technologie VDSL2 et le câble coaxial. L’Arcep souligne néanmoins que la fibre FTTH demeure la voie privilégiée pour assurer la pérennité du réseau et répondre à l’évolution des usages numériques.
Pour les entreprises, c’est un gage de fiabilité à long terme : la fibre, contrairement à des solutions en cuivre ou même au câble, assure une évolutivité quasi infinie. Le marché B2B se montre particulièrement attentif aux promesses de symétrie (débit identique en téléchargement et en envoi) et de garantie de service – des critères de plus en plus valorisés, y compris dans les zones rurales où se développent des activités industrielles et logistiques.
Zoom sur les zones AMII et AMEL
L’Arcep est chargée de vérifier que les opérateurs respectent leurs promesses de déploiement FTTH dans les zones dites AMII (appels à manifestation d’intentions d’investissement) et AMEL (appels à manifestation d’engagements locaux). Dans les premières, Orange et SFR s’étaient engagés à couvrir un certain nombre de communes : à la fin décembre 2024, Orange avait raccordé environ 92 % des locaux prévus, tandis que SFR dépassait les 97 %.
Pour les zones AMEL, souvent plus éparses et nécessitant un surcroît d’organisation, l’état d’avancement varie d’un territoire à l’autre. L’Arcep publie un récapitulatif complet pour mesurer le respect des délais. Ces dispositifs soulignent la complexité du déploiement de la fibre en dehors des zones très denses, là où les modèles économiques exigent généralement un partenariat fort entre les opérateurs et les collectivités.
Quelques perspectives pour le marché professionnel
Avec 75 % des abonnements internet désormais souscrits en fibre en France, la dynamique est bien enclenchée. Les entreprises ne se contentent plus d’une simple connexion : elles réclament des solutions de cybersécurité, des services de qualité de service renforcée et la possibilité de manager leurs propres VLAN (réseaux locaux virtuels) pour segmenter leurs usages. La généralisation de la fibre constitue donc une opportunité pour les opérateurs de monétiser de nouveaux services à valeur ajoutée, qu’il s’agisse de la téléphonie IP, du cloud computing ou des VPN d’entreprise.
Cependant, pour achever la couverture à 100 %, les zones difficiles d’accès exigent une mobilisation collective soutenue. L’enjeu n’est pas uniquement de répondre à la demande grand public, mais de permettre au tissu économique local de se moderniser (start-up, PME innovantes, exploitations agricoles connectées, etc.). Le léger ralentissement observé fin 2024 ne doit donc pas masquer l’objectif global de résorber les disparités d’accès entre métropoles et territoires ruraux.
Ce nouveau bilan de l’Arcep confirme donc l’avancée du pays sur la voie du très haut débit généralisé. L’étape suivante, sans doute, sera la stabilisation complète de la phase de déploiement, accompagnée d’une course à l’innovation sur les services – autant de signaux d’un marché en pleine maturité, qui sait que la fibre est désormais un prérequis essentiel pour la transformation numérique de l’économie française.