Alors que le déploiement de la couverture mobile reste un sujet majeur pour combler la fracture numérique en France, le gouvernement adopte une approche mesurée vis-à-vis des nouvelles propositions des opérateurs. Si le soutien étatique pour l’expansion du réseau est réaffirmé, l’idée de Xavier Niel, fondateur de Free, de lancer un vaste plan pour prolonger et intensifier le dispositif de couverture mobile, a été reçue avec réserve.
Free propose un renforcement du dispositif de couverture ciblée
Début avril, Free a envoyé un courrier à Marina Ferrari, ancienne secrétaire d’État au numérique, et à Laure de La Raudière, présidente de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), pour soumettre une proposition ambitieuse. L’opérateur demande l’extension du Dispositif de Couverture Ciblée (DCC), élément central de l’accord signé en 2018 entre les opérateurs et l’État. Ce dispositif vise à améliorer la couverture mobile dans les zones mal desservies, en construisant de nouvelles infrastructures pour réduire les zones blanches et améliorer la qualité du réseau en milieu rural.
Dans sa lettre, Free propose d’investir 555 millions d’euros pour ériger 1 200 pylônes supplémentaires, une initiative visant à prolonger le DCC au-delà de sa date de fin prévue en 2025. En échange, l’opérateur sollicite une prolongation de ses fréquences mobiles, afin d’assurer la rentabilité de cet investissement à long terme.
La position du gouvernement : « L’État a fait sa part »
Dans une interview accordée aux Échos, Marc Ferracci, ministre délégué à l’Industrie, a apporté des précisions sur la position du gouvernement. Pour lui, l’État a déjà déployé des efforts financiers significatifs en matière de couverture mobile, injectant près de trois milliards d’euros pour aider les opérateurs à renforcer leur réseau dans les zones rurales et isolées. En rappelant cet engagement, le ministre semble écarter la perspective d’un financement ou d’un effort supplémentaire de la même envergure, estimant que « l’État a fait sa part ».
Toutefois, le gouvernement ne ferme pas complètement la porte à un soutien technique et réglementaire. Marc Ferracci a souligné que le projet de loi de simplification de la vie économique, récemment voté au Sénat, contient des dispositions destinées à faciliter le déploiement des infrastructures de réseau mobile pour les quatre grands opérateurs : Orange, Free, SFR et Bouygues Telecom. Ce texte législatif prévoit notamment des mesures visant à alléger certaines procédures administratives, ce qui pourrait permettre aux opérateurs de construire plus rapidement des antennes et d’étendre leur couverture sans se heurter à des obstacles bureaucratiques.
Un soutien technique, mais une réticence envers un plan d’ampleur
Bien que le gouvernement ne soit pas opposé à assouplir le cadre réglementaire pour aider les opérateurs, il reste prudent vis-à-vis de la proposition de Xavier Niel. La vision de ce dernier, qui plaide pour un déploiement accéléré et massif d’infrastructures, n’a pas reçu le soutien espéré. La réponse de Marc Ferracci, qui insiste sur l’engagement déjà consenti par l’État, reflète une volonté de limiter les dépenses publiques supplémentaires, tout en cherchant à maintenir une pression sur les opérateurs pour qu’ils investissent de manière autonome.
Le ministre se dit toutefois « à l’écoute » et prêt à « enrichir le texte » lorsque le projet de loi sera examiné à l’Assemblée nationale. Cette ouverture laisse entrevoir la possibilité d’ajustements qui pourraient faciliter davantage le déploiement du réseau mobile, mais sans pour autant adopter un plan d’envergure comme celui proposé par Xavier Niel.
Vers un équilibre entre soutien public et initiatives privées
La position du gouvernement souligne un équilibre complexe entre intervention publique et incitation au financement privé. D’un côté, l’État reconnaît l’importance de la couverture mobile pour la compétitivité et la cohésion territoriale ; de l’autre, il cherche à responsabiliser les opérateurs et à limiter les investissements publics dans un contexte de contraintes budgétaires.
Les discussions à venir au Parlement permettront d’éclaircir les intentions du gouvernement quant aux futurs moyens de soutien pour le déploiement des réseaux en zones rurales. Pour Xavier Niel et Free, l’enjeu est désormais de convaincre que leur proposition représente un gain collectif pour la couverture numérique nationale. Dans tous les cas, la balle semble désormais dans le camp des députés, qui pourraient jouer un rôle déterminant dans le choix final d’un modèle de déploiement de la couverture mobile en France.