L’annonce par DAZN, codétenteur des droits de diffusion de la Ligue 1 aux côtés de BeIn Sports, de ses nouveaux tarifs d’abonnement a provoqué un véritable séisme parmi les fans de football et les téléspectateurs. À 39,99 euros par mois pour huit matchs sur neuf, les tarifs de la formule mensuelle sont jugés excessifs par de nombreux consommateurs, certains allant même jusqu’à appeler au boycott selon The Media Leader.
Cette flambée des prix pousse une partie des spectateurs à se tourner vers des alternatives illégales, telles que Telegram, l’IPTV et les VPN, offrant une échappatoire face à des coûts jugés prohibitifs. Une tendance qui représente une menace pour les diffuseurs, les clubs, les agences publicitaires mais aussi les annonceurs.
La sage de l’appel d’offres et. les nouvelles donnes
Après des mois de spéculation, DAZN et beIN Sports ont remporté l’appel d’offres pour les droits de diffusion de la Ligue 1 pour la période 2024-2029. DAZN diffusera huit des neuf matchs de chaque journée, tandis que beIN Sports proposera le dernier match pour 15 euros par mois.
L’accord, qui s’élève à 500 millions d’euros par saison, reflète la stratégie de la Ligue de Football Professionnel (LFP) visant à maximiser l’audience et les revenus. Cependant, ces tarifs élevés alimentent les critiques et poussent certains consommateurs à explorer des options illégales.
Il est intéressant de rappeler qu’il y a 20 ans, suivre la Ligue 1 coûtait environ 80,40 euros par mois. Aujourd’hui, bien que les tarifs soient inférieurs, oscillant entre 45 et 55 euros, ils restent élevés aux yeux de nombreux consommateurs, surtout en comparaison avec des offres comme celle de Canal+ pour les compétitions européennes, disponibles à seulement 10 euros par mois. Cette dissonance tarifaire risque d’encourager encore plus de consommateurs à se tourner vers le piratage.
Face à ces défis, la LFP avait envisagé de lancer une chaîne dédiée à la Ligue 1, avec un abonnement plus abordable de 25 à 30 euros par mois. Bien que cette initiative n’ait pas vu le jour, elle démontre cependant la volonté de la LFP de reprendre le contrôle de la diffusion, réduisant ainsi sa dépendance à des partenaires comme DAZN et beIN Sports.
DAZN et sa stratégie de distribution élargie
Pour accroître son audience, DAZN a multiplié les partenariats stratégiques. En s’associant avec Amazon Prime Video, DAZN offre désormais ses contenus aux abonnés Prime moyennant un petit supplément. Cette collaboration s’inscrit dans une stratégie plus large dont l’objectif est à terme d’intégrer DAZN dans des écosystèmes de streaming bien établis. De plus, DAZN a conclu un partenariat avec Deezer, fusionnant sport et musique, et avec Free pour diffuser des extraits quasi-directs des matchs de la Ligue 1 via l’application Free FOOT, augmentant ainsi l’accessibilité.
Bertrand Nadeau, CEO d’OMD France, reste cependant réservé sur ces partenariats selon The Media Leader dans un article publié en toute fin de semaine dernière. Il souligne notamment la complexité de lancer une chaîne 100% dédiée à la Ligue 1 tout en cherchant à atteindre l’équilibre financier : « Avec DAZN, pour la première fois, on a un entrant qui a décidé d’être à l’équilibre. Jusqu’à présent, personne n’a essayé d’être 100 % rentable. » Nadeau note néanmoins que l’objectif de DAZN d’atteindre 1,5 million d’abonnés en six mois semble ambitieux, surtout en comparaison avec beIN, qui a mis deux ans pour atteindre un million d’abonnés.
Pour renforcer sa présence sur le marché français, DAZN a lancé DAZN 1, une chaîne linéaire disponible via Canal+, et intégré son application sur la plateforme myCanal. Ces initiatives doivent néanmoins assurer une meilleure accessibilité de leurs contenus sportifs à un public élargi.
La montée en puissance du piratage
Parallèlement, le piratage sportif connaît une recrudescence inquiétante. Selon le baromètre de l’Arcom, 19% des Français consomment du sport de manière illégale. Lors d’une rencontre récente, plus de 200 000 connexions ont été enregistrées sur Telegram pour accéder illégalement à un match, et on estime qu’un million de spectateurs ont suivi illégalement une rencontre entre Le Havre et le Paris Saint-Germain. Ces chiffres montrent l’ampleur du problème, qui menace non seulement DAZN mais l’ensemble de l’écosystème du football français.
Une étude de l’Arcom confirme que les prix élevés (39%) et la fragmentation des offres (32%) sont les principales motivations du piratage.
L’impact non négligeable sur le marché publicitaire
La stratégie de DAZN soulève également des questions concernant le marché publicitaire. Les tarifs proposés par la plateforme, notamment les offres à 29,99 euros par mois pour un abonnement annuel ou 39,99 euros pour un mensuel, semblent trop élevés pour permettre une intégration publicitaire.
La concurrence entre DAZN et beIN Sports pose également des défis : « S’il y a une duplication entre DAZN et beIN, pourquoi toucher DAZN alors qu’on pourrait toucher les mêmes sur beIN ? » Cette question soulève la possibilité d’une cannibalisation des audiences, réduisant ainsi l’efficacité des campagnes publicitaires.
La situation actuelle du marché de la diffusion sportive contraste fortement avec l’industrie musicale, où le streaming à bas prix est devenu la norme. La hausse des tarifs et la dégradation de l’expérience utilisateur pourraient inciter davantage de consommateurs à se tourner vers le piratage, ce qui serait catastrophique pour les clubs, les diffuseurs et le marché publicitaire. Intégrer de la publicité pourrait certes aider à réduire le piratage, en rendant les offres plus abordables et plus attractives pour un public plus large. Cependant, sur un marché qui évolue constamment, trouver l’équilibre entre rentabilité et accessibilité sera primordial pour DAZN et ses partenaires.
Source The Media Leader