Pour la première fois de son histoire, CNews a dépassé BFMTV en parts d’audience sur un mois. En mai, CNews a enregistré une part d’audience (PDA) de 2,8%, contre 2,7% pour BFMTV. Cette performance a été saluée comme « historique » par la chaîne, appartenant au groupe Canal+, contrôlé par le milliardaire conservateur Vincent Bolloré. Pascal Praud, principale figure de CNews, s’est dit « fier » de cette réussite.
Une concurrence féroce entre Bolloré et Saadé
Cette montée en puissance de CNews s’inscrit dans un contexte de compétition acharnée entre deux géants des médias en France : Vincent Bolloré et Rodolphe Saadé. Bolloré, via son groupe Vivendi, a pris le contrôle de Canal+ et transformé CNews (anciennement iTélé) en une chaîne d’information continue, adoptant une ligne éditoriale conservatrice similaire à celle de Fox News aux États-Unis.
De l’autre côté, Rodolphe Saadé, dirigeant de CMA CGM, a récemment annoncé l’acquisition de BFMTV et d’autres actifs médiatiques d’Altice Media, détenus par Patrick Drahi. Cette acquisition, prévue pour être finalisée dans les mois à venir, marque une étape importante pour Saadé dans sa stratégie de diversification et d’expansion dans le secteur des médias.
La domination de CNews sur BFMTV a obligatoirement des implications significatives pour le paysage audiovisuel français. Premièrement, elle reflète un changement dans les préférences des téléspectateurs vers des contenus plus polarisés et d’opinion. CNews, avec son ton provocateur et ses débats animés, semble attirer une audience croissante en quête de programmes plus engagés.
Deuxièmement, cette évolution pourrait influencer le marché publicitaire. Une part d’audience plus élevée pour CNews pourrait attirer davantage d’annonceurs, modifiant ainsi les flux de revenus dans le secteur. De plus, le succès de CNews est véritablement susceptible d’inciter d’autres chaînes à adopter des formats similaires pour capter une part de cette audience.
Le véritable enjeu : le renouvellement des fréquences
Alors que le processus de sélection pour 15 fréquences en 2025 est en cours, CNews se trouve dans une position délicate. Bien que la chaîne ait enregistré une performance impressionnante, elle reste sous surveillance stricte de l’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique). En mai, CNews a été sanctionnée par l’Arcom avec une amende de 50 000 euros pour des propos jugés inappropriés. Cette régulation stricte et les critiques sur le contenu éditorial de la chaîne posent des questions sur son futur renouvellement de fréquence.
Le processus de sélection, dirigé par l’Arcom, verra 25 candidatures en lice, y compris des propositions de figures influentes comme le magnat tchèque Daniel Kretinsky. Les décisions seront annoncées fin juillet, et le renouvellement des fréquences de CNews sera scruté de près, notamment par des personnalités politiques et des régulateurs qui ont exprimé des réserves sur la ligne éditoriale de la chaîne.
Vers une polarisation des médias ?
La rivalité entre Vincent Bolloré et Rodolphe Saadé pourrait également intensifier la polarisation des médias en France. Alors que CNews poursuit une ligne éditoriale conservatrice, BFMTV est susceptible de chercher à se distinguer par un journalisme plus traditionnel et factuel. Cette dichotomie aurait pour avantage d’offrir aux téléspectateurs des choix clairs en matière de contenu, mais elle risque également de fragmenter davantage le paysage médiatique français.
La montée en puissance de CNews sur BFMTV marque vrai un tournant philosophique dans le paysage audiovisuel français. Elle souligne non seulement les dynamiques concurrentielles entre deux magnats des médias, Vincent Bolloré et Rodolphe Saadé, mais aussi une transformation potentiellement durable des préférences des téléspectateurs vers des contenus plus polarisés.
Le futur renouvellement des fréquences par l’Arcom sera un moment clé pour évaluer la direction que prendra ce secteur en pleine mutation.