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Le plan américain pour briser la domination de Google menace ses profits et son développement en intelligence artificielle

Le gouvernement américain a lancé une offensive sans précédent contre Google, visant à remettre en cause son monopole sur la recherche en ligne. Cette initiative, portée par le ministère de la Justice (DoJ), pourrait ébranler le cœur même du modèle économique de Google, tout en freinant ses ambitions dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA). Bien que l’issue de cette procédure pourrait prendre des années, les remèdes proposés par le DoJ suscitent déjà de vives réactions chez les analystes, qui craignent une déstabilisation durable du géant du web.

Des solutions potentielles mais qui touchent au cœur de l’empire Google

Mardi, le ministère de la Justice a annoncé qu’il pourrait demander à un juge de forcer Google, filiale d’Alphabet, à céder des parties clés de son activité, telles que son navigateur Chrome ou son système d’exploitation Android. Ces outils sont utilisés par l’entreprise pour maintenir sa position dominante sur le marché de la recherche en ligne. Parmi les autres solutions envisagées : interdire à Google de collecter des données sensibles sur ses utilisateurs, forcer l’entreprise à partager ses résultats de recherche avec ses concurrents, ou encore permettre aux sites web de refuser que leur contenu soit utilisé pour former des produits d’IA.

Ces propositions visent à briser la domination de Google sur le marché et à ouvrir la voie à une concurrence plus équitable, mais elles pourraient aussi menacer les fondements de l’empire Internet qui a fait de Google un acteur incontournable. « Le ministère de la Justice a réécrit la formule du succès de Google et a l’intention de la démanteler », a déclaré Gil Luria, directeur général et analyste principal chez D.A. Davidson.

Des menaces pour l’intelligence artificielle

Les remèdes envisagés ne se limitent pas aux activités de recherche. Le ministère de la Justice propose également des limitations sur la manière dont Google collecte et utilise les données, notamment celles qui servent à entraîner des modèles d’IA. Cela pourrait porter un coup sévère à Google, déjà sous pression dans ce domaine face à des concurrents comme OpenAI, qui développe ChatGPT, et d’autres entreprises spécialisées dans les moteurs de recherche alimentés par l’IA, comme Perplexity.

Selon Mark Shmulik, analyste chez Bernstein, cette situation pourrait constituer un obstacle majeur pour Google : « La dernière chose dont Google a besoin en ce moment dans la bataille de l’IA est de devoir se battre avec une main attachée dans le dos par les régulateurs. » En effet, Google fait face à une pression croissante alors que des rivaux comme Microsoft Bing ou DuckDuckGo pourraient profiter des nouvelles restrictions imposées.

… mais aussi pour les revenus publicitaires

Un autre domaine clé touché par ces remèdes est celui des publicités de recherche, qui représentent une part significative des revenus de Google. Selon les prévisions de eMarketer, la part de marché américaine de Google dans ce secteur pourrait tomber en dessous de 50 % d’ici 2025, un niveau historiquement bas. Si les régulateurs obligent Google à partager ses données avec ses concurrents, cela pourrait favoriser des plateformes comme Meta ou Amazon, en leur donnant accès à des informations précieuses pour capter davantage d’utilisateurs et d’annonceurs.

Une bataille judiciaire incertaine

Cependant, certains analystes restent sceptiques quant à l’efficacité de ces remèdes. Pour Adam Kovacevich, PDG de Chamber of Progress, un groupe représentant des entreprises technologiques, le DoJ s’engage dans une bataille risquée. « Le ministère de la Justice jette des spaghettis contre le mur », a-t-il déclaré, soulignant que beaucoup des propositions de remèdes vont bien au-delà de ce qu’un tribunal pourrait accepter. Les recours structurels, comme la scission de Chrome ou d’Android, sont en effet des mesures radicales qui pourraient ne pas survivre au processus d’appel.

Malgré ces incertitudes, les actions d’Alphabet ont chuté de 2,8 % après l’annonce du plan du DoJ, ce qui témoigne des inquiétudes des investisseurs. Toutefois, Russ Mould, directeur des investissements chez AJ Bell, relativise l’impact immédiat de cette annonce : « Les investisseurs savent depuis longtemps que ce risque existe, et ne semblent pas croire qu’une rupture forcée se produira à court terme. »

Vers une refonte du marché de la recherche et de l’IA ?

Les prochaines étapes de cette bataille judiciaire pourraient remodeler le paysage de la recherche en ligne et de l’intelligence artificielle pour les années à venir. Les entreprises comme DuckDuckGo, Microsoft, et Amazon pourraient tirer profit des difficultés de Google pour renforcer leur propre présence sur le marché. De même, en limitant la capacité de Google à utiliser les données pour ses produits d’IA, le DoJ pourrait rééquilibrer la concurrence dans ce domaine en plein essor.

Reste à voir si ces remèdes seront adoptés et, surtout, s’ils réussiront à mettre fin à la domination de Google sans nuire à son rôle moteur dans l’innovation technologique. Pour l’instant, une chose est sûre : la bataille pour l’avenir de l’Internet et de l’intelligence artificielle ne fait que commencer.

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