La Federal Trade Commission, autorité antitrust américaine, accuse plusieurs cadres d’Amazon d’avoir eu recours à la messagerie chiffrée signal pour supprimer automatiquement leurs échanges. une pratique comparable à une destruction délibérée de preuves, estiment les régulateurs.
Les cadres incriminés auraient utilisé la fonctionnalité de suppression de messages de Signal.
L’autorité a sollicité l’intervention d’un juge pour qu’il ordonne à Amazon de fournir des documents relatifs à son traitement des données, rapporte le Washington Post ; une demande qui s’inscrit dans le cadre d’une enquête portant sur les pratiques du géant de l’e-commerce, impacté en septembre dernier pour abus de position dominante.
Il est notamment accusé, entre autres choses, d’avoir créé un algorithme de tarification secret qui lui aurait permis de générer plus d’un milliard de dollars de bénéfices supplémentaires.
Des discussions secrètes de la haute direction sous le feu des accusations de la FTC
La FTC reproche aujourd’hui à la société d’avoir intentionnellement caché des informations aux enquêteurs.
« Pendant des années, les cadres supérieurs d’Amazon, y compris le fondateur et ancien pdg jeff bezos, ont discuté de questions commerciales sensibles, y compris antitrust, sur l’application de messagerie cryptée signal au lieu du courrier électronique », allègue-t-elle dans son document.
Le régulateur explique avoir indiqué à Amazon dès 2019 qu’une enquête à son sujet était ouverte. lorsqu’une entreprise sait qu’elle est poursuivie ou susceptible de l’être, elle a l’obligation légale de conserver les documents et les communications pouvant s’avérer pertinents pour l’affaire.
Or, les dirigeants de la société, notamment Jeff Bezos, l’actuel PDG Andy Jassy ou bien l’avocat général David Zapolsky et l’ancien responsable mondial des opérations Dave Clark ont tous utilisé Signal plutôt que les emails pour échanger.
Des traces numériques révèlent des discussions sensibles au coeur d’un conflit avec la FTC
La messagerie dispose en effet d’une fonctionnalité activant l’autodestruction des messages, qu’Amazon a décidé de conserver plus de 15 mois après avoir été informé de l’enquête, assure la FTC.
« Bien que le contenu des messages supprimés soit impossible à récupérer, l’application indique quand un utilisateur active ou désactive la fonction de disparition des messages, ou modifie le délai de suppression, laissant des traces qui montrent que les suppressions effectuées par les dirigeants d’Amazon étaient très répandues », argumente l’organisme.
« Il est évident que les dirigeants d’Amazon ont utilisé signal pour parler de questions commerciales liées à la concurrence », poursuit-il.
Amazon, de son côté, nie.
« Les affirmations de la FTC sont sans fondement. Amazon a volontairement révélé à la FTC l’utilisation limitée de Signal par ses employés il y a plusieurs années, a collecté de manière exhaustive les conversations signal des téléphones de ses employés et a permis au personnel de l’agence d’inspecter ces conversations même lorsqu’elles n’avaient rien à voir avec l’enquête de la FTC », a réagi un porte-parole d’Amazon.
Si le juge estime que l’entreprise a fait preuve de négligence, elle risque de se voir infliger de lourdes sanctions. Une situation qui pourrait même empirer s’il reconnaît toute forme d’intentionnalité.
Le procès opposant les deux parties constituera le point culminant du conflit opposant Amazon et Lina Khan, la présidente de la FTC.
Connue pour ses prises de position contre le géant de l’e-commerce, la jeune commissaire a soutenu à plusieurs reprises que celui-ci devrait être démantelé au vu de ses pratiques anticoncurrentielles.