La question de l’existence d’un ministère du numérique revient à chaque nouvelle législature. Pourtant, à l’heure où le digital est central dans presque tous les secteurs, sa structuration au sein du gouvernement reste floue. La nomination de Clara Chappaz comme ministre déléguée au numérique dans le gouvernement de Michel Barnier a ravivé le débat. Diplômée de l’Essec et de la Harvard Business School, et ancienne directrice de la FrenchTech, elle a l’expérience du monde des startups. Mais est-ce vraiment ce dont la France a besoin pour relever les défis numériques à venir ?
Clara Chappaz est sans doute bien armée pour porter les intérêts des startups et du commerce en ligne. Cependant, le numérique dépasse largement ce cadre. Les besoins touchent aussi bien à l’industrie, à l’éducation ou encore à la santé. Le numérique ne peut être réduit à un vivier de jeunes pousses prometteuses. Ce secteur nécessite une approche plus globale, s’inscrivant dans une véritable stratégie nationale et européenne. C’est là que le profil de Chappaz, bien que qualifié, montre ses limites : une politique numérique ne peut se réduire à la FrenchTech.
Un ministère trop large ou une délégation plus agile ?
Certains plaident pour un changement de méthode : plutôt que de conserver un ministère, pourquoi ne pas créer une petite délégation présidentielle ? Avec une équipe restreinte, mais composée d’experts techniques et scientifiques, cette cellule pourrait piloter une politique numérique plus agile, cohérente et, surtout, indépendante des cycles politiques. Une telle délégation pourrait mieux s’adapter aux enjeux de long terme, coordonner des actions au niveau européen et résister aux lobbys.
Les priorités pour le numérique
Le numérique en France doit s’articuler autour de quelques axes essentiels. Premièrement, la formation des ingénieurs spécialisés dans les infrastructures et systèmes de demain est primordiale. Il faut réformer les filières universitaires pour les adapter aux technologies de pointe. Deuxièmement, la France ne pourra pas rivaliser seule avec les mastodontes que sont les États-Unis ou la Chine. Une coopération européenne renforcée, inspirée par le modèle de la DARPA américaine, pourrait permettre de combler le retard. Enfin, la régulation européenne doit être simplifiée. Le cadre législatif actuel, bien qu’important pour encadrer les géants du numérique, freine parfois l’innovation.
S’inspirer du modèle américain
Si la France veut réussir dans le numérique, elle doit s’inspirer des réussites américaines. Les États-Unis misent sur une commande publique ambitieuse, des universités de pointe, un accès facilité au capital et une immigration sélective attirant les meilleurs talents mondiaux. En France, l’enjeu est de trouver le bon équilibre entre encadrement et stimulation de l’innovation.
La France a besoin d’une véritable vision dans ce domaine. Qu’il s’agisse d’un ministère réformé ou d’une délégation présidentielle, il est temps de sortir d’une vision restreinte pour répondre aux enjeux économiques et technologiques globaux.