Depuis plusieurs années, l’Union européenne intensifie sa lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et fiscales des géants du numérique, souvent regroupés sous l’acronyme GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Récemment, Apple et Google se sont retrouvés une nouvelle fois confrontés à des décisions judiciaires qui ont un impact considérable sur leur fonctionnement en Europe.
Apple, en particulier, a été épinglée pour avoir bénéficié d’un traitement fiscal extrêmement favorable en Irlande. En 2016, la Commission européenne a ordonné à l’entreprise de rembourser 13 milliards d’euros d’impôts non payés à l’Irlande, pour la période allant de 2003 à 2014. Ce traitement fiscal, jugé illégal, permettait à Apple de payer un taux d’imposition extrêmement bas, atteignant 0,005 % en 2014. Malgré plusieurs tentatives pour faire appel de cette décision, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a récemment confirmé cette amende, consolidant ainsi la volonté de l’UE de mettre fin aux avantages fiscaux excessifs accordés aux multinationales.
Cette affaire s’inscrit dans une démarche plus large de la part des régulateurs européens visant à harmoniser la fiscalité des entreprises et à empêcher l’évasion fiscale à grande échelle. L’UE, de concert avec d’autres grandes puissances économiques, a soutenu l’instauration d’une taxe minimale mondiale de 15 % sur les multinationales, un accord entériné en 2021 dans le cadre du G7 et du G20.
Pratiques anticoncurrentielles : Google dans le collimateur
En parallèle, Google a été sanctionné pour des pratiques anticoncurrentielles. En 2017, la Commission européenne a infligé au géant de la recherche en ligne une amende de 2,4 milliards d’euros pour avoir abusé de sa position dominante en favorisant son propre service de comparateur de prix, Google Shopping, au détriment de ses concurrents. Google a également tenté de faire appel de cette décision, mais la CJUE a rejeté sa requête, confirmant que la domination d’un marché n’est pas illégale en soi, mais son exploitation abusive l’est.
Google n’en est pas à son premier contentieux avec l’UE. Au total, le géant a accumulé plus de 8 milliards d’euros d’amendes liées à des affaires antitrust. Les régulateurs européens continuent d’examiner d’autres pratiques, notamment liées à son système d’exploitation Android et à son service publicitaire AdSense. Les répercussions de ces enquêtes pourraient être lourdes, certaines amendes envisageant même des réorganisations internes, comme la vente potentielle d’activités publicitaires lucratives.
Un cadre réglementaire renforcé avec le DMA
Afin de mieux encadrer les pratiques des géants du numérique, l’UE a adopté en mars 2022 le Digital Markets Act (DMA), une législation visant à limiter les abus de position dominante. Cette nouvelle réglementation impose des obligations strictes aux entreprises dominantes dans le secteur numérique, les obligeant à respecter des règles équitables de concurrence sous peine de sanctions sévères.
Apple pourrait d’ailleurs faire face à une nouvelle amende si l’UE confirme que son App Store ne respecte pas les règles de concurrence instaurées par le DMA. Une décision finale est attendue d’ici mars 2025.
En tout état de cause, ces actions démontrent que les GAFAM ne peuvent plus se soustraire aux règles européennes sans en payer les conséquences.