Le revers de la 4è licence
Les désaccords entre le gouvernement et l’Arcep (Autorité de régulation des télécoms) sont plus visibles que jamais : « coupable » d’avoir permis l’entrée de Free Mobile sur le marché de la téléphonie mobile, le gendarme des télécoms pourrait se voir retirer certains de ses pouvoirs…
Dans un rapport confidentiel, que BFM Business a réussi à consulter, les deux ministres Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin suggèrent — sous couvert de « rééquilibrage » — de retirer un grand nombre de pouvoirs à l’autorité indépendante de régulation.
Le rapport propose notamment de retirer presque tout pouvoir de l’Arcep en ce qui concerne les réseaux mobiles. Jusqu’à maintenant, l’Autorité détient l’initiative sur toutes les actions liées à la délivrance de licences, le gouvernement ne pouvant que fixer le prix des licences et émettre un potentiel droit de veto (jamais utilisé). Le projet prévoit de confier la plupart de ses pouvoirs à l’État, tandis que l’Arcep n’aurait plus qu’un rôle essentiellement consultatif. Difficile de ne pas y voir une sanction à l’encontre de l’autorité, suite au rôle qu’elle a joué dans la mise en place de la quatrième licence mobile accordée à Free…
Il est également prévu de retirer ses pouvoirs à l’Arcep en matière de fibre optique. L’autorité indépendante paierait ici les mauvais résultats de la France en matière de déploiement du très haut débit. Là encore, tous les pouvoirs seraient récupérés par l’État, tandis que le rôle de l’Arcep se limiterait à un « avis public ».
Enfin, l’Arcep se verrait privée de ses compétences dans le domaine du droit des consommateurs. « L’Arcep a souhaité garantir un degré de protection du consommateur très élevé, mais parfois au détriment de l’efficacité économique », estime le rapport. En filigrane, il faut y voir, à nouveau, une sanction suite à la mise en place de la quatrième licence : le rapport suggère d’ailleurs de renforcer la protection et le développement de l’emploi, en réaction aux reproches adressés à l’Arcep, accusée d’avoir trop négligé ce critère en préambule de l’arrivée de Free Mobile sur le marché.
Reste à savoir si ces propositions pourront être mises en application dans le cadre du droit européen, qui conseille le modèle des autorités indépendantes pour la régulation des télécoms au sein des États membres. Confier la quasi-totalité du pouvoir décisionnel à l’État pourrait ne pas être du goût de la Commission européenne, qui pourrait alors choisir d’avertir la France, et d’intervenir si besoin…