Can be late
Fréquemment pointée du doigt pour son retard (présumé) sur le très haut débit et le déploiement de la fibre optique à domicile, la France mérite-t-elle vraiment cette réputation ? À cette question, le président de l’Arcep (Autorité de régulation des télécoms) répond par la négative…
Jean-Ludovic Silicani se permet, dans un éditorial publié dans la dernière lettre hebdomadaire de l’Arcep, de prendre le contre-pied de la tendance, chiffres à l’appui. Ainsi, en Europe, « 6 millions de foyers sont éligibles au très haut débit en France, contre 2 millions en Italie, et moins d’un million en Allemagne et en Espagne. La France est également le premier parmi les grands pays européens pour la part des abonnements (environ deux-tiers) offrant plus de 10Mbps (…) On doit enfin souligner que la France est le seul des grands pays d’Europe où le chiffre d’affaires du secteur n’a pas baissé entre 2008 et 2011 », martèle-t-il.
Si la France accuse du retard par rapport aux leaders du très haut début, comme le Japon ou la Corée, cela n’est pas étonnant : ces pays « ont déployé depuis plus de 10 ans, des réseaux à très haut débit dans des conditions très différentes de ce qui peut être réalisé en Europe ou aux Etats-Unis, ne serait-ce qu’en raison de la forte densité du peuplement dans les pays asiatiques », explique le président de l’Arcep. Même si là, encore, « il faut relativiser cette avance : au Japon, le taux de pénétration (abonnements rapportés à la population) du haut et du très haut débit est inférieur à celui de la France (27% contre 34%, selon l’OCDE) ».
Il invite à se pencher sur l’exemple de l’Asie, dont il faut s’inspirer sans l’imiter pour autant, et à s’éloigner autant que possible du modèle présenté par les États-Unis, victime selon lui de « l’affaiblissement de la régulation et du caractère insuffisant de l’animation concurrentielle » ayant provoqué son retard sur le haut débit et le triple play — notamment en termes tarifaires.
Le régulateur invite donc à poursuivre la croissance de la France, en investissant quelques 6 milliards d’euros par an dans les réseaux à très haut débit (fixe et mobile) ainsi que dans la mise à jour des réseaux déjà existants. Un tel niveau d’investissement est jugé « tout à fait atteignable » par J.-L. Silicani, qui précise que ce chiffre a déjà été dépassé par les investissements « exceptionnels » des deux dernières années (de 7,5 à 8 milliards d’euros investis annuellement). Ce dispositif privé sera à compléter par des financements publics, pour « atteindre les 30 à 35 milliards d’euros nécessaires, sur une quinzaine d’années » jugés nécessaires pour le déploiement des réseaux de fibre optique et 4G nationaux.